Logement : 20 choses à connaître sur la trêve hivernale

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La trêve hivernale interdit l’expulsion d’un locataire durant les mois d’hiver. Voici 20 choses à savoir concernant ce répit saisonnier.
20 choses à savoir sur la trêve hivernale
20 choses à savoir sur la trêve hivernale

Vous vous demandez si vous pouvez procéder à l’expulsion d’un locataire qui ne paie pas son loyer ? Tout dépend de la période de l’année. En effet, vous êtes contraints par la trêve hivernale. Cette période, qui couvre les 5 mois d’hiver, interdit au propriétaire bailleur de procéder à l’expulsion de son locataire. Et cela, même s’il dispose d’une décision judiciaire en sa faveur.

Les locataires bénéficient d’une protection durant ce temps. Ils peuvent le mettre à profit pour trouver des solutions afin de se reloger ou d’éviter l’expulsion. Voici 20 choses à savoir concernant la trêve hivernale.

1/ Qui a mis en place la trêve hivernale en France ?

👉 Le point de départ de la demande d’une trêve hivernale est le discours de l’Abbé Pierre sur Radio Luxembourg à l’hiver 1954.

Celui-ci avait interpelé l’opinion publique sur le sort des personnes expulsées de leur logement durant l’hiver.

Sous son impulsion, la loi du 3 décembre 1956 est promulguée. Celle-ci instaure une période durant laquelle les propriétaires bailleurs ont interdiction d’expulser les locataires. Cette période concerne les mois d’hiver. A cette époque, la loi fixe la durée de ce répit saisonnier du 1er décembre au 15 mars de l’année suivante.

Ainsi, la trêve hivernale constitue une période durant laquelle les procédures d’expulsion de logement sont suspendues.

L' abbé Pierre et la trêve hivernale

2/ Qui fixe les dates de trêve hivernale ?

👉 La loi fixe les dates de la trêve hivernale.

La loi a allongé la durée de la trêve hivernale au fil du temps. Les dates de trêve hivernale s’appliquant actuellement sont issues de la loi Alur (Loi pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové) du 24 mars 2014.

De plus, diverses lois ont renforcé les droits des occupants durant ces 5 mois d’hiver :

La loi Brottes du 15 avril 2013 et le décret du 27 février 2014 introduisent le principe de trêve hivernale  pour l’accès à l’électricité et au gaz. Durant l’hiver, les fournisseurs d’énergie n’ont pas le droit de couper les accès à ces services même en cas de factures impayées. Les occupants ont droit à un logement chauffé et éclairé.

La loi Egalité et Citoyenneté du 27 janvier 2017 a inclus les occupants de terrains dans les bénéficiaires de la trêve hivernale, sous certaines réserves toutefois. Cette loi vise à protéger certains habitants de bidonvilles notamment. La loi ne s’applique plus uniquement aux locaux d’habitation mais aux « lieux habités ».

3/ Quand s’applique la trêve hivernale 2024 ?

👉 La trêve hivernale s’applique du 1er novembre 2024 au 31 mars 2025.

En effet, la trêve hivernale commence systématiquement au 1er novembre pour prendre fin au 31 mars de l’année suivante. Durant ce temps, les expulsions sont obligatoirement suspendues.

4/ Qui a droit à la trêve hivernale?

👉 La trêve hivernale concerne les locataires d’un logement ou d’un terrain.

Pour les occupants d’un terrain, la trêve hivernale ne s’applique pas en cas d’arrêté municipal, dite « de péril » (désormais appelé « mise en sécurité »), ni lorsque les occupants sont entrés sur les lieux par « voie de fait », autrement dit par effraction.

5/ Peut-on mettre un locataire dehors en hiver ?

👉 En principe, non.

Il n’est pas possible de mettre un locataire dehors durant la trêve hivernale, mais vous pouvez entamer les démarches car celles-ci sont souvent longues. En revanche, l’application de cette décision est reportée à la fin de la trêve.

Il existe toutefois des exceptions.

6/ Quelles sont les situations où la trêve hivernale ne s’applique pas ?

👉 Dans certains cas, il est possible de faire partir un locataire durant les 5 mois d’hiver.

Voici les exceptions à la trêve hivernale :

  • les locataires bénéficient d’un programme de relogement adapté ;
  • les occupants d’un logement CROUS en cas de décision administrative ;
  • le locataire est considéré comme de mauvaise foi (attesté par la décision de justice) ;
  • en cas d’expulsion du domicile familial ordonnée par le juge aux affaires familiales dans le cadre de violence conjugales et familiales ou d’un divorce, car il s’agit d’une mesure de protection ;
  • la préfecture ou la commune a pris un arrêté de mise en péril concernant un bâtiment avec relogement de prévu ;
  • lorsque les occupants ne sont pas locataires légitimes, mais ce que l’on appelle des « squatteurs ».

⚠️ Il n’est pas possible de faire partir un locataire sans une décision de justice décidant de l’expulsion.

7/ La trêve hivernale s’applique-t-elle aux squatteurs ?

👉 Non, la trêve hivernale ne bénéficie pas aux squatteurs.

Les squatteurs sont des occupants illégaux, entrés dans les lieux par voie de fait, c’est-à-dire sans autorisation du propriétaire, et portant matériellement et illégalement une atteinte grave au droit de propriété.

Le squatteur ne possède pas de bail locatif. Il peut être expulsé même durant la trêve hivernale.

⚠️ Un bailleur ne doit pas chercher à expulser lui-même la personne occupant illégalement son logement, il doit porter plainte et demander l’expulsion des squatteurs.

8/ Peut-on arrêter de payer ses loyers pendant la trêve hivernale ?

👉 Non. La trêve hivernale ne permet pas d’arrêter le paiement de ses loyers.

Cependant, un locataire ne payant pas ses loyers ne peut être expulsé durant les 5 mois d’hiver même si une décision de justice a été rendue en ce sens.

9-Puis-je ne pas payer mon loyer si je n’ai pas de chauffage ?

👉 Non. Dans tous les cas un locataire ne peut pas décider d’arrêter de payer son loyer. Il serait en tort.

En revanche, en cas d’absence de chauffage, le locataire peut demander l’autorisation au juge de consigner le loyer sur un compte à la Caisse des Dépôts au lieu de le verser directement à son propriétaire et cela, jusqu’à ce que le chauffage soit réparé.

Trêve hivernale et chauffage

10/ Qui sont les locataires protégés ?

Certaines personnes bénéficie d’un statut de locataire protégé.

Il s’agit des personnes suivantes :

  • locataires âgés de plus de 65 ans ne dépassant pas un certain seuil de revenu pour la location de leur résidence principale ;
  • locataires en situation de handicap ne dépassant pas un certain seuil de revenu.

⚠️ Lorsque le bailleur est lui-même âgé de plus de soixante-cinq ans ou si ses revenus annuelles sont inférieurs au plafond de ressources, le statut de locataire protégé est annulé.

11/ Peut-on couper l’électricité pendant la trêve hivernale ?

👉 Non, il n’est pas autorisé de couper électricité pendant la trêve hivernale.

Un bailleur n’est pas autorisé à couper l’électricité à un locataire durant les 5 mois d’hiver. De même, les fournisseurs d’énergie ne peuvent pas couper les accès du locataire en cas de factures impayées.
En effet, la loi Brottes du 15 avril 2013 a posé le principe de trêve hivernale pour l’accès à l’électricité et au gaz.

12/ Quelles sanctions en cas de non respect de la trêve hivernale ?

Un bailleur qui ne respecte pas la trêve hivernale ou oblige le locataire à quitter son logement sans respecter la procédure d’expulsion s’expose à des sanctions :

  • 3 mois de prison ;
  • 30 000 € d’amende.

Ces sanctions sont prévues par la loi Alur de 2014.

13/ Comment se passe une expulsion après la trêve hivernale ?

👉 La reprise des expulsions est possible au 1er avril de chaque année.

Ainsi, à l’issue de la trêve, la procédure d’expulsion locative suspendue par la trêve peut reprendre si le problème n’a pas été résolu.

Dans ce cas, un huissier se présente chez le locataire après expiration des délais pour le faire partir.
En cas résistance du locataire, l’huissier dresse un procès-verbal d’expulsion. Il n’emploie jamais la force lui-même mais demande le recours aux forces de l’ordre. C’est le préfet qui est chargé d’autoriser ce recours.

Expulser un locataire après la trêve hivernale

14/ Quels sont les motifs d’expulsion ?

Pour mettre un locataire dehors, le bailleur doit avoir un motif sérieux. Voici les principaux motifs d’expulsion acceptés par les juges :

  • Défaut de paiement des loyers et des charges locatives ;
  • Absence de souscription à une assurance habitation ;
  • Dégradation du bien ;
  • La sous-location non autorisée par le bailleur ;
  • L’exécution de travaux non autorisés par le bailleur ;
  • Troubles anormaux au voisinage ;
  • Refus du locataire de quitter les lieux dans le cadre d’un congé donné par le bailleur en bonne et due forme.
  • La communication d’informations erronées à la signature du bail comme de fausses fiches de paie

Ces motifs sont inscrits de la loi du du 6 juillet 1989.

15/ Quel est le délai pour mettre un locataire dehors ?

👉 Un locataire dispose de 2 mois pour partir du logement après avoir reçu un commandement de quitter les lieux.

Par exception, un juge peut raccourcir ou supprimer ce délai. Par exemple, si le locataire est de mauvaise foi.

16/ Qui paie les frais d’expulsion d’un locataire ?

👉 Les frais d’huissier sont normalement supportés par le locataire expulsé.

Cependant, c’est en pratique le bailleur qui procède à l’avance de frais d’huissier car ils doivent être payés en amont de la procédure d’expulsion.

Les frais d’huissier sont engagés pour faire appliquer la décision d’expulsion prise par le juge.

17/ Est-il possible d’annuler une expulsion ?

👉 Oui, il est toujours possible d’obtenir l’annulation d’une décision d’expulsion.

√  Au cours de la procédure d’assignation, la procédure d’expulsion peut encore être arrêtée ou suspendue.
√ Même une fois le commandement de quitter les lieux par le locataire, il reste possible de suspendre ou d’arrêter la procédure d’expulsion.

Le juge peut accorder un délai supplémentaire de 3 mois à 3 ans maximum selon la situation du locataire. Celui-ci est tenu de montrer sa bonne volonté à résoudre la situation : rembourser les loyers dus dans le délai supplémentaire, rechercher un autre logement, saisir la régie pour surendettement personnel  (2 ans de délai peut être accordé dans ce cas).

18/ Quelles sont les aides pour les locataires en difficultés ?

En cas de difficultés à payer ses charges et son loyer il existe des aides :

  • La garantie Visale : ce dispositif prend en charge le paiement du loyer et des charges locatives prévus par le bail en cas de difficultés ;
  • Le chèque énergie : le chèque énergie est versé par l’Etat aux ménages modestes afin de les aider à payer leurs factures d’électricité , il est conditionné au revenu ;
  • L’accompagnement au règlement des factures : en cas de difficultés à payer les factures d’énergie, il faut contacter son fournisseur pour bénéficier d’un accompagnement pour le règlement des factures : facilités de paiement, échelonnement de la dette, etc. ;

19/ Comment faire pour ne pas se faire expulser ?

Un accident de la vie peut survenir, il est important de rester de bonne foi pour éviter l’expulsion.

En cas de difficultés temporaires pour s’acquitter du paiement du logement, il est possible de demander des aides.

Il est surtout urgent d’en faire part à son bailleur pour mettre en place un plan pour le paiement du loyer : échéancier, plan d’apurement de la dette, etc.

La même chose peut être faite avec les fournisseurs d’énergie pour apurer les dettes.

📷 Images : Fondation Abbé Pierre, Pixabay

📝 Sources : Directement intégrées par des liens dans le texte de l’article.

Sommaire

    Aurore R

    Aurore est journaliste-rédactrice sur les sujets économiques, entreprises et sociaux.

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